Cela fait maintenant un mois que je suis partie. Je ne vais pas vous mentir : partir seule, avec juste un sac à dos et un billet aller, m’a fait un peu peur au début. Pourtant, j’ai l’habitude de voyager seule, mais c’est la première fois que je partais en tant que backpackeuse. C’était également la première fois que je traversais des pays aussi variés en termes de climat, de religion et de culture, ou que je découvrais des destinations que je connaissais à peine, comme la Mongolie ou l’Ouzbékistan. Voici donc mon petit retour d’expérience, quelques astuces, ainsi qu’une interview avec Camille et Sally, deux backpackeuses qui ont gentiment accepté de partager leurs conseils.
Les petits tips quand on voyage seule
Voyager seule n’est finalement pas si différent du quotidien d’une femme. Quelques règles de bon sens s’appliquent : éviter de sortir tard le soir, privilégier les chambres privées ou les dortoirs réservés aux femmes, et adopter une tenue qui attire le moins d’attention possible.
Pour Camille, cheffe cuisinière en voyage depuis un mois, l’étape qui l’inquiétait le plus était la traversée de la Russie à bord du célèbre Transsibérien : « For the Transsiberian, I chose the dorm with more beds because if something happens, more people can help me. »
Une autre difficulté souvent rencontrée, selon Camille et Sally, est cette fameuse question récurrente : « Mais tu n’as pas de mari ? Où est-il ? » Afin d’éviter ces interrogatoires ou des situations délicates, les deux voyageuses ont trouvé une solution simple : mettre une photo de leur (faux ou vrai) copain en fond d’écran et prétendre qu’il les attend à l’hôtel.
Taxis et guides : le cauchemar des backpackeuses
Dans tous les pays où je suis allée, les chauffeurs de taxi et les guides touristiques étaient systématiquement des hommes. Se retrouver seule dans un espace clos avec un inconnu peut être source d’anxiété. En tant que débutante, j’ai parfois commis l’erreur de m’asseoir à l’avant et d’engager la conversation, ce qui m’a valu quelques situations inconfortables. Par exemple, en Ouzbékistan, un conducteur s’est permis des blagues à connotation sexuelle, m’a encouragée à boire de la vodka avec lui, et a posé sa main sur ma cuisse en riant. Rien de grave, mais des moments embarrassants et inquiétants lorsqu’on voyage seule.
Sally et Camille ont également vécu ce genre de situations. Leur solution est simple : s’asseoir à l’arrière, éviter d’être trop avenante, et de privilégier les taxis partagés lorsque c’est possible. (Vous pourrez retrouver leurs témoignages détaillés dans l’interview à la fin de cet article.)
Éviter certains pays lorsqu’on voyage seule ?
Lors de la préparation de mon voyage, je me suis posé cette question. Je ne voulais pas me restreindre, mais après avoir consulté France Diplomatie et les groupes de voyageurs, j’ai finalement décidé d’éviter un seul pays jugé trop risqué pour une femme seule : l’Inde.
De son côté, Sally a exclu l’Afghanistan de son itinéraire. Globalement, les pays à majorité musulmane inquiètent davantage les voyageuses, particulièrement les pays arabes. Toutefois, Sally et Camille admettent que ces craintes sont parfois infondées. Les destinations qu’elles redoutaient le plus, comme la Russie ou l’Asie centrale, se sont finalement révélées être parmi leurs plus belles étapes.
Les avantages d’être une solo traveler
Enfin, comme le rappellent les deux backpackeuses, voyager seule ne présente pas que des inconvénients. J’ai moi-même souvent bénéficié de petites attentions : des personnes m’aidant à porter mes affaires, des chauffeurs de taxi m’offrant des bouteilles d’eau, ou encore des gestes de bienveillance dans des hôtels et restaurants. Ces moments m’ont bien plus marquée que les rares comportements déplacés ou inquiétants.
Interview : Voyager en tant que femme seule – Qu’est-ce que ça implique ?
Présentations :
Camille, 30 ans, cheffe cuisinière à Paris.
« Je suis partie de France pour rejoindre le Vietnam sans prendre l’avion. Cela fait maintenant un mois que je suis en voyage. »
Sally, 31 ans, consultante en relations publiques.
« Mon voyage dure cinq mois et demi : six mois en Asie centrale, sur la route de la soie, puis six autres mois en Amérique du Sud. »
Qu’est-ce que les gens vous ont dit à propos de voyager seule ?
Sally :
« Les gens qui me connaissent n’étaient pas surpris, mais 99 % d’entre eux trouvaient que c’était très courageux. Les femmes disaient souvent qu’elles n’oseraient jamais, surtout en Asie centrale, une région peu connue. Ma mère, par exemple, était très inquiète par rapport au Kazakhstan.
Pour beaucoup, il y avait aussi l’idée que ce voyage risquait de mettre en péril ma relation de couple. Certains m’ont demandé si j’étais vraiment sûre de partir : "Tu as déjà 30 ans, tu n’as pas encore d’enfants, et tu vas tout laisser tomber pour voyager ?" »
Camille :
« C’était à peu près pareil pour moi. La seule personne vraiment inquiète, c’était ma mère, qui m’a demandé de lui donner régulièrement des nouvelles. La Russie était la partie qui l’effrayait le plus, à cause de la guerre. Beaucoup de gens me demandaient aussi pourquoi je ne prenais pas l’avion. »
Avez-vous des règles pour assurer votre sécurité pendant le voyage ?
Camille :
« Ce ne sont pas vraiment des règles, mais je suis plus prudente. Je réserve uniquement des dortoirs féminins, j’évite de sortir seule pour des soirées, et je ne prends pas de taxi la nuit.
Comme je voyageais dans des pays froids, les vêtements n’étaient pas vraiment un problème, mais il faut faire attention à son attitude avec les hommes : ne pas être trop souriante ou avenante. Je dis systématiquement que j’ai un copain, même si ce n’est pas vrai, et qu’il m’attend quelque part.
Pour le Transsibérien, j’ai choisi un compartiment avec plusieurs lits, car je me sentais plus en sécurité entourée de monde en cas de problème. »
Sally :
« Ce sont surtout des précautions de bon sens, comme celles que je prendrais en Allemagne. Je ne fais pas de randonnée seule, je n’utilise pas Couchsurfing chez des hommes, et je m’assois toujours à l’arrière des taxis. J’écoute aussi mon instinct : je ne marche pas en étant ivre la nuit, et j’évite les tours guidés avec des hommes.
Les vêtements jouent un rôle important, surtout en fonction de la culture locale. En Asie centrale, où les pays sont majoritairement musulmans, les gens sont plus conservateurs. Une fois, j’ai porté une robe d’été légère, et c’était problématique en Ouzbékistan et au Tadjikistan, où les femmes doivent couvrir leurs bras. Cela permet d’éviter d’attirer l’attention, par respect pour la culture et pour se faire remarquer le moins possible. En plus, comme je suis blonde, je remarque que je suis davantage observée quand je laisse mes cheveux détachés. »
En tant que femme, y a-t-il des pays que vous évitez ?
Sally :
« Oui, l’Afghanistan, comme tout le monde en Asie centrale, en raison de la situation des droits des femmes. Pour d’autres pays, je reconnais que c’est parfois basé sur des stéréotypes racistes. J’ai déjà visité deux pays arabes, mais je préfère éviter certaines régions par précaution. »
Camille :
« Je n’évite pas spécifiquement des pays parce que je suis une femme, mais certains pays moins connus, notamment musulmans, peuvent sembler plus dangereux. Par exemple, je n’ai pas encore exploré certaines parties de la route sud. Mais comme je fais le voyage en train, je vais peut-être tenter ces régions sur le chemin du retour. »
Quelle partie du voyage vous a le plus effrayée ? Était-ce un cliché ou une réalité ?
Camille :
« La Russie. Pourtant, cela s’est avéré être l’une des meilleures étapes de mon voyage. Les gens étaient incroyablement bienveillants, surtout parce que j’étais une femme voyageant seule. Je ne me suis jamais sentie mal à l’aise, bien au contraire. »
Sally :
« Au début, c’était le Tadjikistan, car je n’avais que très peu d’informations sur ce pays. Mais finalement, j’étais moins effrayée qu’en pensant à l’Amérique du Sud, par exemple. »
Anecdotes
Sally :
- Tadjikistan : « Pour aller d’une ville à l’autre, on doit souvent utiliser des taxis partagés. Une fois, j’ai pris un taxi où j’étais la première passagère. Le chauffeur a insisté pour parler avec moi, puis il m’a envoyé des messages via un traducteur : "Je pense qu’on passerait une super nuit ensemble", ou encore "Et si on faisait une pause d’une heure avant de reprendre la route ?" J’ai fini par changer de taxi pour en prendre un avec déjà plusieurs passagers. »
- Kazakhstan : « Dans un train, un homme a commencé à me poser des questions sur des sujets intimes. Ce n’était pas vraiment une agression, mais c’était clairement inapproprié et gênant. »
Camille :
- Russie : « Dans un dortoir, un voyageur ivre a insisté pour dormir dans mon lit. Il m’a envoyé des messages pendant plus de 30 minutes après que je lui ai dit non. »
En Russie, j’ai rencontré le seul autre voyageur dans la région. Nous sommes sortis, avons bu des bières et passé une super soirée. Nous dormions dans le même dortoir. Après être rentrés tard, je devais prendre un train tôt le lendemain matin. Nous étions un peu éméchés.
À un moment donné, il a voulu dormir avec moi. J’ai refusé, il est allé se coucher, mais il n’a pas arrêté de taper sur ma cloison. Pendant environ 35 minutes, il m’a aussi envoyé des messages sur WhatsApp.
- Transsibérien : « Des militaires dans le train parlaient de moi. Un autre voyageur, qui parlait anglais, m’a traduit leurs paroles et m’a aidée à créer un rideau pour être plus à l’aise et éviter leurs regards insistants.
Dans le Transsibérien, le train faisait de nombreux arrêts, avec des passagers qui montaient et descendaient régulièrement. À un moment donné, deux Russes sont montés et ont commencé à boire avec un ancien militaire qui était déjà présent. Je sentais qu’ils parlaient de moi. Nous avons échangé quelques mots, mais leur anglais était limité, donc la conversation restait très basique.
Un autre passager est ensuite monté, et lui parlait bien anglais. En entendant les deux Russes discuter, il m’a expliqué qu’ils parlaient de moi et m’a conseillé de faire attention à l’ancien militaire. Il a alors proposé de m’aider à me sentir plus à l’aise : il a installé un rideau pour que je puisse avoir un peu d’intimité et dormir sans être observée.
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